Conférence AsIAm 2019
J’ai eu la chance et l’honneur de pouvoir assister à la quatrième édition de la “National Autism Conference”, organisée par AsIAm en Irlande. Cette année, la conférence s’est déroulée sur deux jours. Le premier jour était dédié aux professionnels tandis que le second était à destination des parents et des personnes autistes elles-mêmes.
Le thème de la conférence était l’importance des partenariats entre les personnes autistes et les professionnels.
Ci-dessous, un petit résumé des différentes interventions.
Andy McDonnell & Joan McDonald : Professionnels respectueux
Dans cette première présentation, le professeur Andy McDonnell présenta comment en tant que comportementaliste, comment il est passé d’une approche dans les années 90 où l’autisme était vu comme un ensemble de comportements à corriger, à traiter, à une approche plus respectueuse pour les personnes concernées. Dans les années 90, il passait son temps à observer des patients et à cocher des cases selon si les « comportement cible » étaient acquis et où le but était de faire « entrer ces personnes dans le moule ». Aujourd’hui, il est plus dans l’interaction et cherche à apprendre des personnes autistes avant d’essayer de les faire progresser dans les domaines où elles souhaitent progresser.
Également, beaucoup de personnes autistes
Il nota également que même en 2019, beaucoup d’approches n’ont pas fait leurs preuves comme ABA mais que nous continuons de les utiliser
@BastienBConfais: "In 2019, we still use many approaches that are not evidence-based and this is problematic" #AsIAmConf19
Joan McDonald a quant à elle retracée son parcours en tant que personne autiste, ayant elle-même un enfant autiste. Elle a également présenté « Autistic Paddies », un groupe de personnes autistes qu’elle a créé et qui permet aux personnes de s’entraider. Les sujets principalement discutés concernent le stress et l’anxiété car ce sont des sujets pour lesquels les services de santé en Irlande ne sont pas capables de répondre.
@BastienBConfais: In @APaddies, we support mutually and discuss stress, ptsd, because the mental health services are not really functioning for autsitic people. - @dawumps at #AsIAmConf19
Pour faire echo au changement de paradigme présenté précédemment par Andy McDonnell, Joan McDonald a présenté le monotropisme. Il s’agit d’une explication positive de l’autisme, où l’autisme est fut comme la capacité pour une personne de se concentrer sur une seule chose à la fois.
Pour conclure, Joan McDonald a donné une liste de conseils pour les professionnels :
- Prenez en compte le fait que les personnes autistes ont des compétences
- Prenez en compte l’anxiété
- Utilisez le moyen de communication que la personne préfère
- Permettez aux personnes autistes de prendre part aux décisions
- Obtenez l’information de plusieurs sources
- Soyez clairs
Mary Doherty & Stuart Neilson : Un service de santé accessible
Dans cette présentation, Mary Doherty et Stuart Neilson ont présenté les résultats de leur étude sur les barrières auxquelles les personnes autistes font face pour aller chez le médecin. Le premier constat est que les personnes autistes ont une espérance de vie plus courte que le reste de la population. En cherchant les raisons de ce constat, Mary Doherty et Stuart Neilson ont regardé de quoi décédaient les personnes autistes. Ils ont trouvé que toutes les causes de décès étaient plus probables que dans la population en général mais que la probabilité de mourir d’une maladie était très supérieure. C’est la raison pour laquelle ils se sont intéressés aux difficultés que rencontrent les personnes autistes pour aller chez le médecin.
La première barrière identifiée est de devoir utiliser le téléphone pour prendre rendez-vous. Madame Doherty a cité un exemple dans lequel une personne savait qu’elle faisait une crise cardiaque mais elle ne pouvait pas prendre le téléphone pour appeler une ambulance.
@BastienBConfais: The most common barrier to access GP is that autistic people cannot even take an appointment because they cannot use the telephone - #AsIAmConf19
Le second problème est que les personnes autistes ne décrivent pas la douleur de la façon dont les médecins sont formés pour la prendre en compte. Les personnes autistes décrivent le type de douleur qu’ils ressentent alors que les médecins veulent plutôt connaître l’intensité.
L’étude montre également que nombreux sont les médecins généralistes à ne pas avoir eu de formation à l’autisme. De la même façon, pour 40 % des personnes autistes, leur médecin n’est pas informé de leur autisme.
La conclusion de cette présentation est :
- Les médecins devraient être formés à l’autisme
- Ils devraient toujours proposer des moyens alternatifs de communication (que l’on puisse décrire des symptômes par écrit ou que l’on puisse prendre un rendez-vous sans avoir à utiliser le téléphone)
L’importance de rendre les services accessibles aux personnes autistes : Carly Jones MBE
Carly Jones MBE a décrit son parcours, mais aussi surtout ses qualités, qu’elle partage avec de nombreuses personnes autistes tel que le respect des règles.
@AsIAmIreland: Strengths of autism. @CarlyJonesMBE spelling out the kinds of talents that won't show up on a school test. #AsIAmConf19
Dans la deuxième partie de son intervention elle a listé tout un tas de manques que nous avons aujourd’hui dans la sensibilisation à l’autisme.
Par exemple, les personnes autistes peuvent se faire escroquer car gérer son argent est difficile et les banques ne sont pas formées. Préparer les femmes autistes à donner naissance à un enfant est également quelque chose qui est aujourd’hui négligé.
Une bonne santé mentale tout au long de la vie : Professeur Louise Gallagher, Dr. Linda O’Rourke and Danni Burke
La session a commencé par Danni Burke qui a décrit la vie difficile qu’elle a eue, son expérience en hôpital pour tentative de suicide puis la découverte de son autisme lorsqu’elle était déjà adulte. Par la suite le professeur Louise Gallagher a continué pour décrire la santé mentale chez les personnes autistes. L’anxiété et la dépression sont les difficultés rencontrées par le plus de monde.
@BastienBConfais: Anxiety and ADHD are the most common mental health conditions in autistic youths - @lgallagh_louise at #AsIAmConf19
Nous retiendrons que :
- toutes les personnes autistes ne peuvent pas être diagnostiquées avec un simple rendez-vous.
- L’environnement joue un rôle essentiel : les procédures doivent être simples, les directions claires.
- L’environnement sensoriel doit être pris en compte
- Il faut constamment évaluer les pratiques
- Prendre des médicaments à très faible dose est quelque chose qui ne fonctionne pas
Le futur de la neurodiversité : Steve Silberman
Steve Silberman a expliqué pourquoi en 80 ans, le monde n’est pas encore accessible aux personnes autistes. Il a retracé l’histoire de l’autisme avec la « découverte » de Léo Kanner et de Hans Asperger. Pour Léo Kanner, les intérêts spécifiques des personnes autistes sont quelque chose de pathologiques tandis que Hans Asperger voyait plutôt cela comme une bonne chose. Il a ensuite retracé l’histoire et expliqué comment nous passons lentement d’une approche médicale de l’autisme à une vision plus sociétale.
Ce qu’il faut retenir de ce discours très intéressant est que nous dépensons trop de temps et d’argent pour trouver les causes de l’autisme, les gènes associés à l’autisme et des traitements pour l’autisme alors que nous devrions nous focaliser sur ce qui permet aux personnes autistes de vivre une vie heureuse et de s’épanouir.
@BastienBConfais: Instead of spending so much efforts on genetic to find the causes of autism, scientists should look for how to reduce bullying in childhood, but also what factors help autistic people to live a happy life? #AsIAmConf19
Gérer le stress dans la vie de tous les jours : Mary O’Kane and Emma Buckley
Dans cette présentation, Mary O’Kane a présenté différents moyens de gérer le stress et l’anxiété. Elle a commencé par annoncer ce qui ne fonctionne pas, à savoir :
- Rassurer simplement
- Promettre que ce qui inquiète la personne ne se passer apas
- Amplifier la sensation d’anxiété
- Éviter de parler de ce qui génère de l’anxiété
@BastienBConfais: Things that do not work to help someone dealing with anxiety: - Making simple reassurance - Promise that it will never happen - Amplify the anxious feelings - Avoiding what cause anxiety #AsIAmConf19
À la place, elle propose :
- Des techniques de respiration
- D’écrire sur un papier, dans un journal, ce qui inquiète la personne et de voir qu’à la fin de la journée, beaucoup de préoccupations étaient sans importance
- De se défouler pour arrêter de penser et retrouver l’instant présent
@BastienBConfais: How to deal with anxiety: - Breath in a controlled way - Grounding can bring you back to what is happening to the moment - Glitter jars to regain self control - Use a worry box or a journal to write down what you worry about - Draw worries as a bully
L’environnement comme un partenaire : Dr. Magda Mostafa
Magda Mostafa est une architecte qui s’est spécialisée dans la conception de bâtiments accessibles aux personnes autistes. Elle fait le constat qu’en 2019, elle est quasiment la seule à s’intéresser à cette question.
Elle a développé un outil qui permet d’évaluer l’accessibilité d’un bâtiment. Les critères retenus sont :
- Acoustique : L’environnement acoustique peut être contrôlé, où les bruits de fonds sont limités
- Séquentialité : L’espace doit être séquencé, c’est-à-dire organisé selon un ordre logique, de l’entrée jusqu’à la sortie
- Échappatoire : Il doit y avoir un moyen de s’échapper de l’environnement sensoriel. Cela consiste généralement à mettre à disposition des endroits calmes
- Compartimenté : Chaque endroit du bâtiment n’a qu’une et une seule fonction bien précise
- Transitions : Des zones de transitions doivent se trouver entre les zones à forte stimulation et les zones à plus faible stimulation. Cela doit permettre aux personnes d’anticiper le changement
- Zones sensorielles : L’environnement doit être organisé selon l’aspect sensoriel. Par exemple les zones à fortes stimulations sensorielles doivent être physiquement proches.
- Sécurité : L’environnement doit être accessible aux enfants et aux enfants autistes, les angles pointus doivent être évités
Plus d’informations sont données sur le site web : autism.archi
@BastienBConfais: Seven criteria as a framework of thinking when we design for autistic people #AsIAmConf19
L’importance des partenariats : Georgia Harper and Sam Ahern
Dans cette présentation Georgia Harper et Sam Ahern ont décrit l’importance des partenariats dans leur façon de rendre le monde plus accessible. Elles ont décrit comment elles avaient travaillé avec un producteur de films pour le documentaire auxquel elles ont participé.
Elles ont également décrit comment elles travaillaient avec des associations comme la National Autistic Society en Angleterre ou encore Autistica. Dans ce dernier partenariat, elles ont insisté sur la collaboration essentielle entre les chercheurs et les personnes autistes.
Conclusion
Cette année encore, la conférence d’AsIAm fut très enrichissante, tant sur le plan scientifique que pour les personnes que j’ai pu y rencontrer.
J’ai adoré pouvoir échanger avec Bobby Byrne qui a créé un caisson pour permettre aux personnes autistes de s’isoler de l’environnement et de se reposer. J’ai également apprécié la discussion avec Mme Julie Dorel de Super Valu, qui m’a longuement expliqué comment les supermarchés irlandais se sont engagés à devenir accessibles aux personnes autistes. Enfin, Fintan Tierney à qui j’ai pu demander des conseils sur la façon dont AsIAm s’y prend pour contacter et démarcher les entreprises, les services publics et afin de rendre la société plus inclusive.
Un grand merci à tous. Maintenant, il ne nous reste plus qu’à importer et recopier ces bonnes pratiques pour faire de la France, un pays « autism-friendly ». Bastien.